Un hôpital militaire à Bois-le-Roi.

Lors de la commémoration du 11 novembre, Madame Michèle SALIOT, élue déléguée au patrimoine, nous a partagé l'histoire de hôpital militaire à Bois-le-Roi. 

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Villa des Fontenys - Hopital militaire

 

"Bonjour à tous, 

 
Je voudrais évoquer rapidement avec vous aujourd’hui, à l’occasion de cette commémoration du 11 novembre 2025, la création d’un hôpital militaire à Bois-le-Roi qui ouvrit ses portes de 1915 à 1918. 

Le premier choc auquel les civils sont confrontés dans le département est l’afflux d’un nombre de blessés partout. En réaction immédiate, la population civile se mobilise généreusement, Bois-le-Roi est la preuve de cet engagement et de ce dévouement. 

L’armée a réquisitionné les trains et de nombreux wagons évacuent les blessés dès 1914. 

On évacue les blessés à dos d’hommes puis en brouettes-portes-brancards et en voitures sanitaires jusqu’à Melun. Puis les blessés sont répartis dans les hôpitaux de Fontainebleau, Montereau et Montargis. Les trains sanitaires sont très lents et s’arrêtent dans toutes les gares, les bonnes dames montent dans les voitures et distribuent de l’eau, de la nourriture, des pansements et apportent du réconfort aux blessés. 

La Santé militaire s’organise seulement fin 1915 avec Justin Godard, sous-secrétaire d’État de la Guerre, responsable du service de santé militaire de 1915 à 1918. Il nomme un inspecteur de santé militaire à Fontainebleau pour inspecter les hôpitaux militaires et les hôpitaux privés qui ne sont pas oubliés. 

 

La commune de Bois-le-Roi compte 2 hôpitaux privés : 
• Une Œuvre d’Assistance aux Convalescents Militaires, association réservée aux blessés graves, aux mutilés, aux gazés, etc. 
Et un hôpital militaire bénévole : la villa des Fonteny face à la mairie d’aujourd’hui. 
La Villa des Fontenys est répertoriée n°52 ter de la 5e région. La 5e région comprend 7 départements. Il fait partie des 34 hôpitaux bénévoles dans cette région. 
La spécificité d’un hôpital bénévole, c’est une petite structure dans un petit village de villégiature qui a une gare et de grandes villas, et qui est créée par un particulier. 

La création de l’hôpital des Fontenys est une belle histoire. 
L’héroïne est Thérèse Bain, épouse d’André Prunier. 

 
Née en 1877, elle a 2 frères dont le peintre post-impressionniste Marcel Bain, dont on peut admirer des tableaux en mairie. 

 
La famille Bain est une famille parisienne très aisée, le père de Thérèse est pharmacien. C’est le début de la villégiature ; ils possèdent une maison de campagne à Bois-le-Roi, rue de France. 

 
Elle se marie à Paris en 1901 avec André Prunier. C’est une famille de négociants en tissus, la famille Prunier occupe un immeuble de vente entier à Paris. 
André et Thérèse n’ont qu’un seul fils qui est de santé délicate. Pour cela, 
Thérèse pense à la campagne et elle achète une demeure à son tour près de chez ses parents à Bois-le-Roi. C’est la Villa de « l’Ermitage ». Grand parc, grand terrain, femmes de chambre, cuisinière, cocher, jardinier, c’est la Belle Époque. 
1914 : la guerre éclate, André est mobilisé. Thérèse reste à Paris et apprend que, dans son entourage parisien, les gens fortunés prêtent leurs maisons pour accueillir à Paris des blessés du front, les soignent dans les hôpitaux — on manque cruellement de personnel — et les orientent vers des lieux de convalescence privés. Tout reste sous le contrôle du ministère de la Santé de l’Armée. 

 

André a une permission. C’est l’anniversaire de Thérèse. Pour son anniversaire, André veut offrir un beau cadeau à sa femme, il pense à un bijou ou bien à une œuvre d’art. 
Mais Thérèse lui fait part d’un projet qui lui tient à cœur. Elle voudrait elle aussi participer à l’effort de guerre. Elle voudrait créer un hôpital pour les soldats blessés. Elle a remarqué une belle bâtisse à Bois-le-Roi, la Villa des Fontenys, qui est libre, et répond à son mari que le plus beau cadeau qu’il puisse lui faire serait de louer cette maison pour en faire un lieu de convalescence pour ses chers blessés. 
L’hôpital bénévole de Bois-le-Roi est né. 

Il ouvre ses portes le 15 novembre 1915. Il possède 40 lits. Il est près de la gare et les blessés arrivent par les trains sanitaires. Lieu magnifique avec ses grands arbres et sa pelouse au pied de l’escalier jusqu’à la Seine et aussi ses bassins d’eau ornés de divinités marines en pierre. 

 
Thérèse choisit une équipe compétente d’infirmières, elle-même devient infirmière et fait jouer ses relations parisiennes. Elle a besoin d’un médecin responsable de l’hôpital. 
Elle est très amie avec le professeur Paul Mathieu, chirurgien à l’hôpital Cochin depuis 1913, qu’on aperçoit sur des photos, et qui a son âge. 
Elle reçoit un infirmier célèbre, Maurice Chevalier, qui a quitté subitement Belfort pour être affecté au 31e régiment d’artillerie de Melun, près de Paris, et ensuite détaché à Bois-le-Roi où il est rejoint par Mistinguett, elle-même en convalescence, qui loue une villa avenue Gallieni, « la Villa Fanfan » : « Tous les soirs nous pouvions dîner ensemble », disait-elle dans ses écrits. 

 
Cet hôpital est sous le contrôle du ministère de la Guerre. Il s’administre lui-même. Pour qu’il fonctionne, le service de Santé militaire lui verse 1 F pour chaque militaire par jour. La gendarmerie locale y passe souvent. On prend des photos des pensionnaires. Sous chaque photo, Thérèse inscrit soigneusement le prénom de ses pensionnaires à qui elle écrira ensuite. 

 
Dès que les blessés sont rétablis, ils reprennent immédiatement le train pour Melun et le front. 

 
En 1917, tous les hôpitaux bénévoles ferment par ordre de la Préfecture. 
L’hôpital bénévole « la Villa des Fontenys » ferme définitivement ses portes le 20 oct. 1917. Toute la literie : oreillers, couvertures, draps et matelas sont donnés à la Société d’Assistance aux Convalescents. Le système de Santé militaire de Seine-et-Marne se restructure."

 

Michèle Saliot, 11 nov. 2025